Vers un nouvel ordre mondial : Quel positionnement pour l’Afrique et le Maroc ?

Tribune

Par Jawad KERDOUDI (*)

Après la seconde guerre mondiale et dès 1947, le monde a connu un ordre bipolaire entre d’une part l’Occident et d’autre part l’URSS.  Les deux blocs se sont livrés à une guerre froide multidimensionnelle. Certains pays africains et asiatiques choisirent l’un ou l’autre camp, tandis que 29 autres ont opté pour le non alignement lors de la Conférence de Bandung qui s’est tenue du 18 au 24 Avril 1955. L’idéologie de l’Occident était caractérisée par la démocratie, le libéralisme économique, l’état de droit, le respect des droits de l’homme. L’idéologie du bloc de l’Est reposait sur un système politique autoritaire, une économie planifiée, et le socialisme prônant l’égalité des classes sociales.

Cet ordre bipolaire a duré jusqu’à 1991, date de la dislocation de l’URSS deux ans après la chute du mur de Berlin en 1989. La même année 1991 a vu la création à Londres de la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement), et qui a eu pour but à l’origine de faciliter le passage à l’économie de marché des pays d’Europe centrale et orientale. Dès lors, les Etats-Unis sont devenus « une hyperpuissance » et ont inauguré un système d’unipolarité, à savoir la seule puissance à avoir la suprématie simultanée dans les quatre domaines-clés : militaire, économique, technologique, et culturel.

Dès 2009 un groupe de quatre pays a été constitué regroupant le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine, auquel s’est joint l’Afrique du Sud en 2011. Ce groupe des BRICS représente 45% de la population mondiale, 31,5% du PIB mondial, et participe aux deux tiers de sa croissance. Les BRICS se présentent comme le pendant du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni) qui représente 30,7% du PIB mondial, et 9,6% de sa population. La guerre en Ukraine déclenchée le 24 Février 2022 a contribué à bouleverser l’ordre mondial qui est devenu multipolaire. Le monde est ainsi constitué à l’heure actuelle de plusieurs pôles de puissances : le bloc occidental composé des Etats-Unis, du Canada, de l’Europe, de l’Australie, de la Corée du Sud et du Japon.

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Le bloc des BRICS qui s’est enrichi lors du 15ème Sommet du 22 au 24 Août 2023 en Afrique du Sud de six pays : Argentine, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Iran, Egypte, Ethiopie, alors qu’une vingtaine d’autres pays ont demandé également l’adhésion à ce groupement. Mais ce bloc ne constitue pas une Alliance proprement dite, car il est peu structuré avec des systèmes politiques différents, dans lequel chaque Etat y cherche tout d’abord son intérêt. Un phénomène nouveau est apparu, c’est le multi-alignement. C’est ainsi que l’Arabie Saoudite, le Brésil et l’Inde sont membres de l’ONU, des BRICS et du G20. De plus l’Inde est membre du Quad qui est une Alliance militaire qui regroupe les Etats-Unis, Le Japon et l’Australie, chargée de surveiller la Chine dans l’Indopacifique. La seule organisation internationale en dehors de l’ONU qui est constituée d’Etats de ces deux blocs est le G20, mais qui est divisé et qui est en perte d’influence. Notons que le Sommet du G20 qui s’est tenu le 9 Septembre 2023 à New Delhi en Inde a admis l’Union africaine en tant que membre.

Quant à l’ONU, elle s’est montrée inefficace pour rétablir la paix en Ukraine, du fait de la composition du Conseil de sécurité, et du droit de véto accordé aux cinq membres permanents. C’est ainsi que seul le président Biden a participé à l’Assemblée générale de l’ONU qui a débuté ses travaux le 18 Septembre 2023. Il y a lieu de réformer impérativement l’ONU, car le monde a besoin d’une institution internationale juste et forte, à même de faire face aux problèmes mondiaux tels que le maintien de la paix, le développement économique et social, ainsi que la lutte contre le changement climatique.

Cette évolution de l’ordre mondial a valorisé la place des pays émergents et en développement dont le soutien est recherché par les deux grands blocs. C’est ainsi que l’Afrique dans sa grande majorité ne s’est alignée sur aucun bloc, et essaye de tirer partie de ses relations extérieures pour renforcer son développement économique et social. Le Maroc tout en optant pour l’Occident dès son indépendance, a diversifié sa politique étrangère dans un souci d’équilibre, et a réussi à maintenir de bonnes relations tant avec la Chine que la Russie.

(*) Jawad KERDOUDI : Président de l’IMRI (Institut Marocain des Relations Internationales)

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